Elle s’appelait Vireauvent, il paraît que c’était une jument très douce….
Il pleut des cordes sur le village, ils s’arrêtent devant le portail du Refuge avec leur 4x4. Ils n’osent pas sortir à cause de la pluie…. Je sors donc et vais les voir.
Il ouvre la vitre (le mari) il précise de suite embarrassé, « on n’est pas venus te voir pour un chien, on est venu te voir pour mon cheval, j’ai pitié de lui, est-ce que tu peux faire quelque chose pour lui, une piqûre ? »
Je leur demande ce qu’il a leur cheval, s’il est malade, blessé…
Ils avouent, la jument était attachée, dans leur champ, elle s’est entravée dans la grosse corde, ils l’ont retrouvée couchée, dans le marécage attenant, la corde enroulé autour d’une cuisse et autour du cou, elle n’arrivait plus à se relever… Ils ont appelé les pompiers pour la sortir de là, « un cousin à lui » !
Il répète, tu peux venir lui faire une piqûre pour qu’elle se lève ?
Je lui réponds, qu’une piqûre, ce serait des antibiotiques, pour une maladie, mais d’après ce qu’ils me disent, elle n’est pas malade, elle s ‘est cassée le cou, ou la patte arrière, ou les deux…. Il répond qu’elle mange et boit, mais ne se lève pas…. Ils sont suppliants…. Ils mettent beaucoup trop d’espoir en moi, je sais que leur jument est perdue…
Je lui dis que lorsqu’un cheval se couche, c’est pour mourir, les chevaux dorment debout, ils ne se couchent jamais… Qu’il ne FAUT JAMAIS ATTACHER LES CHEVAUX, que c’est trop dangereux, si les gens ne sont pas à proximité pour surveiller…. C’est ainsi qu’ils vivent, le cheval attaché dans la brousse ou au champ, loin de chez eux…
Je leur dis que je vais venir, il me répète suppliant : « tu prends la piqûre…. »
J’arrive chez eux, j’ai pris une seringue avec des antibiotiques, mais je sais que je n’en aurais pas besoin, pas de cela… Il me dit : « c’est au champ, là-bas, je monte avec toi », je lui dis : « prends le fusil », il me dit : « non, tu vas faire la piqûre et puis elle se lèvera.. »
Je vois qu’il ne comprend pas, alors je lui demande depuis combien de temps sa jument est ainsi, il répond « deux jours ». Je lui dis : « ça fait deux jours qu’elle souffre ? » il acquiesce malheureux.
Je lui répète de venir avec le fusil, il refuse, il n’a pas le courage, il verra demain, son fils ira au champ la tuer, lui, il ne peut pas. Je lui dis d’aller chercher sa femme, il me répond qu’elle dort, qu’elle fait la sieste. Je lui répète d’aller chercher sa femme… Il finit par y aller…
Je dis à sa femme : « explique-lui qu’il faut tuer le cheval, qu’il souffre inutilement, qu’il ne se lèvera plus… » Elle est plus réaliste, elle lui ordonne de me donner le fusil et dit qu’elle va m’y amener, elle monte dans mon 4x4, il me donne le fusil et repart tristement dans la maison.
Virauvent, est allongée dans la boue, elle est maculée de boue, elle pédale par accès, souffle et gémit, je lui caresse doucement la joue, elle gémit tout doucement et s’arrête un temps de pédaler….
Par acquis de conscience, j’appelle la vétérinaire, lui explique toute l’histoire, elle me répond ce que je savais, que si le cheval ne s’est pas levé depuis deux jours, c’est qu’il a quelque chose de cassé, et qu’il ne se lèvera plus jamais… Je lui, demande où il faut que je mette la balle, elle me répond, « par l’arrière de la tête, entre les deux oreilles »
C’est ce que j’ai fait…. Virauvent ne souffre plus… C’était une jument très grande et très douce….